Tuesday, March 13, 2018

Maurice à 50 ans, quel gâchis !

Notre modèle de développement n’a pas été à la hauteur des attentes de la grande majorité des Mauriciens pour insuffler le dynamisme requis à cause, notamment :

1. Des institutions publiques et des chiens de garde peu fiables. En revanche, il faut des dirigeants crédibles et une équipe engagée pour bâtir des institutions qui inspirent confiance ;

2. De l’affaiblissement de la rule of law. Aussi longtemps que ; l’ensemble de nos lois ne sont pas régulièrement mis à jour et appliqué san get figir ;  la culture de l'impunité s’enracine ; l'exemplarité est ignoré ; la transparence et la redevabilité ne sont pas exigées ; Maurice continuera à susciter la méfiance et le cynisme. La pire chose qui puisse arriver à n'importe quelle nation, c'est l’intériorisation par ses citoyens (et ses nouveaux migrants « défiscalisés ») de la justification morale (et cynique) pour faire fi de la loi ;

3. D’un système qui récompense à peine l’effort, si ce n’est de manière fortement disproportionnée. Les plafonds de verre, la lutte pour joindre les deux bouts et se permettre un habitat décent et désenclavé ne sont pas propices à l'identification au Projet Maurice. Dans ces conditions, ce serait un miracle si, entre autres ; transformer l'esprit zougader en évacuation de stress ; le mépris que véhicule le bling bling des nouveaux riches ; l’affichage des villas à des prix surréalistes ; ne démotivent pas, n’attisent pas les maux sociaux et les problèmes de santé, ne déstabilisent pas les familles, ne nuisent pas à la productivité du travail, n’alimentent pas la fuite des cerveaux, etc ;

4. De l'assistanat des entreprises fatalement anti-lean management par la dépréciation délibérée et persistante de notre monnaie. À l'indépendance, il fallait environ 13 roupies pour acheter une livre sterling. Aujourd'hui, nous avons besoin d'environ 47 roupies. Nous ne pouvons que prier que la roupie ne sombre pas encore au niveau 66 comme en 2007. Ensemble, le pouvoir d'achat en baisse constante, les coûts d'emprunt élevés qui épuisent le revenu disponible et alourdissent la trésorerie, la corruption endémique et le chômage structurel constituent une distorsion systémique monstrueuse qui déclenche un cercle vicieux pour les ménages aussi bien que les entreprises autrement performantes ;

5. Du tapis rouge pour l'accaparement des terres et des plages. Non seulement les grands propriétaires fonciers ont bénéficié d'un renchérissement phénoménal de leurs actifs, les étrangers aussi ont été autorisés à acheter des propriétés. Parallèlement, cette manne a grippé toute initiative à grande échelle visant à sauver notre souveraineté alimentaire en plein désarroi. L'une des mesures phares et audacieuses pour désamorcer un potentiel réveil brutal découlant du ressentiment populaire serait une réforme agraire complète et avisée ;

6. De la disparition de la planification. Au lieu de cela, l'élaboration des politiques a été sous-traitée à des technocrates sans la moindre imagination et à des charlatans. Ce qui est primordial, c'est une culture fondée sur l'expérimentation, l'apprentissage rapide et les améliorations progressives ainsi qu'un mécanisme de carotte et de bâton qui incite les gens à purger le système de ses inefficacités ;

7. Des infrastructures médiocres. Il y a eu certes un réalignement superficiel de la connectivité interne et externe. Hélas dans l'ensemble la tentative n’a réussi à combler qu’une partie du décalage. Sans toutefois rattraper la demande actuelle. En conséquence, anticiper la demande future serait trop demander. Il suffit d'observer comment le « tigre » tropical peut être tétanisé par un cyclone, des pluies torrentielles ou une relative sécheresse, même si le synopsis ne correspond pas à la définition d'un « black swan ». La mauvaise exécution, la maintenance inexistante et l'insouciance dans la maitrise des coûts ont amplifié les inadéquations systémiques. La vérité est que, mesurée à l'échelle mondiale, Maurice est logistiquement à la traine ;

8. De la désactivation du mode créativité, résolution de problèmes et esprit entrepreneurial dans le système éducatif. En fabriquant des « troupeaux de moutons » et en célébrant leur avatar smart, la surspécialisation, l'apprentissage par cœur et l'obsession de l'examen peuvent réconforter les partisans du statu quo au sommet, n’empêche c’est un imbroglio qui fige la formation d’un capital humain apte à faire face à l'assaut de l'intelligence artificielle et survivre la concurrence mondiale féroce ;

9. De l’identité mauricienne perturbée. La réticence à intégrer ouvertement notre lingua franca locale en est une illustration. D’autre part, nous sommes devenus vulnérables au soft power étranger dont les séquelles sont incarnées de manière de plus en plus hégémonique par des récits aliénants (et servant accessoirement  de diversion aux problèmes criants). Surtout depuis l'avènement de la « République » et des bouquets satellitaires. Alors que nous aurions pu exploiter toutes les caractéristiques de notre ADN cosmopolite pour construire une nation ancrée dans des énergies créatives infinies. Ne rien faire à ce sujet est suicidaire ;

10. Lakorite  entachée. En fait, c'est le point qui cristallise tout ce qui précède. C’est le baromètre qui résume les symptômes d’une décadence ou, à contrario, qui révèle le degré de notre bien/mal vivre ensemble. Lorsque certains observateurs affirment que Maurice « moderne » a apprivoisé la bête du « communalisme » (lire le sectarisme), les plus perspicaces ne peuvent qu’exprimer leur scepticisme. Le repli identitaire est dangereusement rampant. Nos différences sont toujours instrumentalisées de façon sordide pour soutenir le clientélisme politique.

On pourrait dire que nous avons assisté à une amélioration de la qualité de vie si le matérialisme est le seul critère du progrès. Peu importe le prix à payer et l’indifférence absolue par rapport à la qualité, l’esthétisme et les normes. Il y a un besoin pressant de délégitimer les agitateurs de la croissance de la cupidité, du ruissellement vers le haut de la richesse nationale, du bat bate, du tribalisme, des aberrations, de la recherche de rente économique / sociale, des tendances ploutocratiques, des injustices, des inégalités, etc.

L'économie de marché en soi n'est pas le problème, elle le devient lorsque les politiques et l'environnement socio-géopolitico-économique tendent à promouvoir un pôle attractif pour les affaires douteuses et la cartellisation. La décroissance de tous ces parasites doit être complétée par une forte croissance de leadership, de vision, de recul, de solutions glocales, de synergie, d'innovation, d'écologie, d'équité, d'empathie et de bien-être.

 Un changement effectif pourrait se matérialiser avec l'émergence d'un élan citoyen conscient des enjeux qui renverserait le majakaro, le sophisme, le déni et le jeu de blâme des «squatters» qui contrôlent les couloirs du pouvoir politique, économique et médiatique. Un pouvoir parfois fissuré pour des intérêts à court terme, mais essentiellement solidaire dans « l’intérêt supérieur du pays » !

Les négativités peuvent être aussi contagieuses qu'une impulsion bienveillante collective – ceci davantage dans un endroit relativement petit. Même si un revirement semble particulièrement rocambolesque, nous devons garder cela à l'esprit.

Friday, March 9, 2018

It took us just 50 years to unbuild Mauritius

Our brand of development has failed to ignite the desired mojo and live up to the expectations of the many because of, namely:

1. Unreliable public institutions and watchdogs. It takes inspirational heads and a committed team to build trustworthy institutions;

2. Weakening rule of law. Unless and until our set of laws and regulations are regularly updated and indiscriminatingly enforced, the culture of impunity for the few fades, leading is by example, transparency and accountability prevail, our motherland will continue to foment mistrust and cynicism. The worst thing to happen to any nation is when people tend to feel they have a moral justification to flout the law;

3. The heavily lopsided reward system. Glass ceilings, the struggle to make ends meet and to afford a decent and unisolated habitat are not conducive to identification to the Mauritius Project. Under these conditions, it would be a miracle if, say, turning zougader* spirit into stress relief, contempt through bling bling of the few and flashing surreally-priced villas on billboards, do not also demotivate, whip up social ills and health issues, ruin families, hurt labour productivity, fuel brain drain, etc.;

4. The "welfare state" for lazy and/or fat businesses courtesy of the deliberate and persistent depreciation of our currency. At independence it took about 13 rupees to buy one pound sterling. Today we need about 47 rupees. We can only pray we never reach the 2007 Peak Dive of 66 rupees. Lumped together, ever-shrinking purchasing power, steep borrowing costs that deplete any disposable income, endemic corruption and structural unemployment constitute a monstrous systemic distorter and parasite that triggers a vicious cycle for households and forward-thinking businesses alike;

5. The red carpet for land grab. Not only have mighty landowners been gifted with phenomenally inflated valuation of their assets, foreigners have been empowered to buy property. The in-built disincentive has frozen any large-scale initiative to salvage our crumbling food sovereignty and reverse the frightening deindustrialisation process. One the wisest and boldest steps to defuse the looming violent wake-up call stemming from brewing popular resentment is through a comprehensive and savvy land reform;

6. The demise of planning. Instead, barring the early years of independence, policymaking has been outsourced to one-track minded technocrats and charlatans. What is paramount is a culture founded on experimentation, fast learning and incremental improvements along with a mechanism of carrot and stick that nudges people to suppress inefficiencies;

7. Shoddy infrastructure. There has been an apparent re-alignment in internal and external connectivity but by and large the attempt has merely managed to fill up part of the lag. Without actually catching up with current demand. Accordingly anticipating projected demand would be asking too much. Just observe how the tropical "tiger" can be overwhelmed by a cyclone or extremely low and high rainfall even if the synopsis does not fit into the definition of a "black swan**". Poor execution, inexistent maintenance and cost ineffectiveness have magnified the inadequacy and systemic disruption. The bitter truth is, measured on a global scale, Mauritius is logistically a laggard;

8. The disabling of the creativity, problem-solving and entrepreneurial mode in the education system. Over-specialization, rote learning and exam obsession that manufacture herds of "sheep" and celebrate their smart avatar may comfort the status quo seekers at the top but they barely train the human capital to cope with the onslaught of artificial intelligence and survive the cut-throat global competition;

9. The nurturing of the self-hating Mauritian. The reluctance to openly embrace our local lingua franca is one illustration. Another is how we have become vulnerable to foreign soft power as epitomised by the “exotic”, unsophisticated and pervasive narratives since the advent of "la république". We have grown grateful to tokenism. When we could have harnessed all the features in our cosmopolitan DNA to build a nation anchored in infinite creative energies. Doing nothing about it is suicidal;

10. Undermined lakorite***. In fact this is the culmination of all the above. When some observers claim that "modern" Mauritius has tamed the beast of "communalisme" (read sectarianism) the more insightful can only wince. Repli identitaire is dangerously alive and kicking. Our differences are still being sordidly instrumentalised to feather vote banks. Whether more subtly, less in-your-face is irrelevant.

Arguably, we have witnessed a nationwide upgrade if materialism is the sole marker of progress. Regardless how dramatic the costs and the absolute disregard for quality and standard. We now desperately need to delegitimise the enablers of growth in instant gratification, GDP extraction, bat bate****, feelbad factor, tribalism, common non-sense, economic and social rent seeking/clientelism, plutocratic tendencies, injustices, inequalities, etc.

Market economy per se is not the problem, it becomes one when policies and socio-economic environment tend to promote a magnetic hub for business hanky panky and cartelisation. The de-growth of these nuisances must simultaneously be complemented with robust growth in leadership, vision, hindsight, home-grown solutions, synergy, innovation, eco-friendliness, fairness, empathy and contentment.

Effective change will roll down with the emergence of a mindful citizen agency that overturns maja karo*****, sophistry, denial and blame game of the "squatters" who control the corridors of political, business and media power. Small can be beautiful as well as awful. It depends on the context. Negativities can be as contagious as a gung-ho impulse. The more so in a relatively small place. Even if a turnaround looks tremendously challenging we must keep this in mind.

* Betting culture.
**An event that comes as a surprise and brings devastating impact in its wake.
*** Effortless sense of collaboration between stakeholders that transcends creed and skin colour.
**** Doing things the least bothered by the imperative of achieving excellence.
**** Overindulgence spree.