Les institutions sont censées réguler la répartition du pouvoir et des biens au sein d'une société. En revanche, lorsque les politiques gouvernementales tendent à être plus favorables aux accapareurs, donnant lieu à un pouvoir économique disproportionné à quelques privilégiés, tôt ou tard des fissures imprègnent le système. Le plus souvent, nous sommes le produit de l'environnement dans lequel nous vivons. Un pays est bien géré lorsque, du sommet à la base, les citoyens intériorisent un ensemble de règles qui sont appliquées sans concession. En bref, notre esprit civique est un composant clé dans l'aboutissement d'une nation à la fois plus performante, plus écoresponsable et plus saine.
Maurice est de plus en plus confronté à un modèle de développement décousu qu'elle a suivi aveuglement sous le parrainage des réseaux toxiques. L'absence flagrante d'une approche intégrée à tous les niveaux stimule crescendo un cercle vicieux, infligeant une sinistrose. Les symptômes de la décadence nationale peuvent être identifiés intuitivement. La crise de confiance des citoyens était prévisible. Naturellement, de plus en plus d'exclus désespérés d'un système qui s'effondre rêvent de rejoindre les affairistes de l'intérieur ou d'émigrer vers des cieux plus favorables. Dans ces conditions, le clientélisme, d'une part, prospère pour exploiter la vulnérabilité du peuple et pour satisfaire le zèle des demandeurs de contrats, d'emplois et de rentes. Et d'autre part, l'instrumentalisation de nos différences culturelles assène le coup fatal.
La fin du délire ?
Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui se rendent compte,
tardivement certes, que la « démocratie », le « miracle » et le « développement
» que nous avons plébiscités avec tant de fierté n'ont été ni inclusifs ni
structurels. Notre « démocratie » s'est en fait transformée en
électocratie vivante – ce qui signifie que pendant cinq ans les
gouvernements peuvent être plus empathiques que voyous, et vice versa,
quasiment au gré de leur humeur – amplifiant une déconnexion entre les
gouvernements et les aspirations de la population ; notre « miracle »
n'a pas réussi à cultiver le talent et la créativité, mais a au contraire
activement favorisé les fléaux sociaux et la fuite des cerveaux ; notre «
développement » a été une obsession pour étaler des infrastructures et générer
la croissance à tout prix, avec pratiquement aucun engagement en faveur de
l'efficacité, de l'optimisation des coûts, de la conformité, de l'esthétique,
de l'écocompatibilité, etc. La recherche du bien-être des citoyens et de leur
capacité à fournir un effort avec un avantage comparatif ont été oubliés dans
les discours politiques.
Le parlement est au cœur d'une démocratie qui fonctionne. Son rôle principal est de mettre en œuvre des lois et des politiques qui préservent et améliorent le bien-être de tous les citoyens. Les partis d'opposition, les médias et la société civile sont censés maintenir les gouvernements sur leurs gardes. L'impartialité du judiciaire et de la police n'est pas négociable. Aucune institution n'est fiable sans un premier ministre éclairé, qui hélas nous échappe toujours, pour envoyer un signal de « tolérance zéro à l'égard de la connerie » à tous leurs dirigeants afin d'instaurer transparence, redévabilité, stabilité et équité à l'échelle nationale.
Des chiens de garde traquant la
corruption endémique avec détermination découragera le clientélisme
économique, contribuera à équilibrer nos comptes nationaux, désamorcera la
concentration du marché, revitalisera la roupie et réduira les inégalités. Un système vicié et avec une visibilité parasitée par des malversations
plombe les coûts et impose une prime aux prix, brimant ainsi la compétitivité globale. Il
est impératif de formuler des incitations à la création de richesses par des
citoyens et des étrangers motivés et capables d'innovation.
Maurice lance un appel de détresse. Aucun révolutionnaire n'est exigé, aucune idéologie n'est revendiquée. Le système réclame quelques solutions rapides et des centaines de mesures progressives à mettre en œuvre sans dissonances pour lier toutes les parties prenantes. Une illusion ne dure jamais. La pente d'un régime sociopathique vers un régime psychopathique est glissante. Qui peut entendre les clameurs pour une métamorphose?
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