Tuesday, October 2, 2018

Communautés : Quand 4+11 ne feront jamais 15

On aurait pu penser, voire souhaiter, qu’après l'échec cinglant de sa tentative de nous embobiner avec le projet “2e république”, l’oligarchie politique allait se ressaisir. Pas du tout. Voilà qu'une frange de cette même oligarchie nous balance sans broncher le “Best Loser Seat”. Comme-ci il n'y avait aucune limite pour abuser de notre désespoir.

Il y a certes des raisons pertinentes pour revisiter notre système électoral. Notamment le financement des campagnes, le redécoupage des circonscriptions, la représentation plus équitable des candidat(e)s comme des citoyen(ne)s. Tâche complexe sans doute qui exige rigueur, patience et même, dans certains cas, référendum. Pas ce messianisme méprisant et simpliste qui bascule dans une session digne de la World Wrestling Entertainment où protagonistes (incluant aussi les wannabes), arbitres, chatterati, pom pom girls & boys simulent l’extase. Sauf que, dans ce cas précis, spectatrices et spectateurs restent plus ou moins groggy.

 La perversion de la recommendation de United Nations Human Rights Committee au sujet de la déclaration communautaire pour participer aux élections cristallise la situation. En effet, cette instance préconise que si nous souhaitons poursuivre avec le Best Loser System (BLS), sans jamais se prononcer sur son abolition ou pas (nullement de son ressort d’ailleurs), c’est avec un recensement réactualisé. Autrement ce serait totalement absurde. Encore faut-il soutenir avec cohérence, ce qui est loin d'être le cas, que le BLS répond effectivement ou pas à cette crainte de demeurer un(e) outsider qui s'identifie à peine aux élus du Parlement.

Ce que nous propose l'oligarchie politique à quelques détails près, avec de surcroît une augmentation du nombre de députés budgétivores, la décrédibilise plus que jamais. En revanche, le 10 juin 2015, le Conseil économique et social des Nations Unies a adopté une résolution qui stipule : le recensement de la population et des logements constitue l'une des principales sources des données nécessaires à la formulation, à la mise en oeuvre et au contrôle de l'efficacité des politiques et programmes visant à promouvoir le développement socioéconomique pour tous et la viabilité écologique.

Sans même se rendre compte de son imposture, l'oligarchie politique se dédouane et culpabilise les citoyen(ne)s censé(e)s entretenir le communalisme. Selon sa vision tordue de la "démocratie", revoir les chiffres de 1972 avec ses 4 communautés anachroniques ouvrirait la "boite de pandore". Mais elle se réserve quand même le droit d'accès à sa propre "boite" de 11 communautés, puisées semble-t-il de manière "scientifique" des noms de famille du registre électoral, qu'elle instrumentalise cyniquement. Peu importe si notre way of life n'est pas invariablement le reflet de notre ADN.

Nous avons tous des identités hyphenated. Par exemple, on peut être en même temps Mauricienne-Créole-Catholique, Mauricien-Hindou, Mauricienne-Agnostique ou bien d'autres combinaisons. Définir les communautés en juxtaposant (non-)croyance religieuse et ethnie étant difficilement évitable. C'est notre vécu qui détermine quelle part prime sur l'autre et la porosité de nos identités plurielles. Le communalisme n'est pas la maladie en soi. Il est symptôme d'une réalité parasitée par des plafonds de verre qui incite au repli sur la communauté perçue comme refuge. L'ethnicity-blindness est une utopie gratifiante qui devient toutefois un délire lorsque ses partisan(e)s essentialisent l’émergence d’une Première ministre non-Hindoue ou d’un Premier ministre non-Hindou. Une approche ethnicity-neutral aurait au moins le mérite de ne pas célébrer une (autre) "république une et indivisible” qui se mente.

Il ne faut pas se tromper d'ennemi : nous sommes tous des "minorités" survivant avec un ascenseur social manifestement en panne à l'extérieur de la réseaucratie. Ce serait plus sage de méditer sur "on améliore que ce qu'on mesure" (correctement s'entend) si nous envisageons de sortir du cercle vicieux. Bien que le BLS ne puisse exister sans comptage communautaire, ce dernier est déterminant aussi pour des recherches, entre autres, socio-économiques, anthropologiques et médicales. "Kisa bebet" qui ne distingue pas le Kreol (Afro-Mauricien(ne)), l'Indien (Hindou(e)), le Blan, le Milat (Euro-Créole), le Mizilman, le Sinwa du Madras (Tamoul(e))? C'est important aussi que chaque citoyen(ne) se reconnaisse dans chaque "case".

Il y aura toujours des outliers et des Mauricien(ne)s qui ne se retrouveront dans aucune "case" soit parce ce que, selon l'image fétichisée, Karl Marx, Che Guevera et Rosa Parks les incarneraient plus fidèlement ou parce que le sentiment in-between prévaut. Les catégories "autre", Pomien (s'identifiant au Pays d'outre-mer - soit une extension de DOM-TOM), Don Quichotte ou Coconut sont incongrues. Peut-être "métis" pourrait faire l'objet d'une "case" à part entière ?  Par contre, les castes et sous-castes sont à proscrire. Ce qui est certain, rien ne doit se faire avec le consensus au sein de l'oligarchie politique uniquement. Mais en concertation avec toutes les parties prenantes pour dresser une liste réfléchie et modulable dans le temps pour la grande majorité des citoyen(ne)s.

Si des voix s'élèvent pour le maintien le BLS, ce n'est pas forcément parce qu'elles sont sectaires (autrement, toute proportion gardée, Martin Luther King par exemple aurait été un communaliste), mais, paradoxalement, parce que le BLS a failli dans sa mission après 50 ans. Pour diverses raisons, tout le monde n'a pas le même profil anthropologique. Une affirmative action sert justement à pallier ce décalage. Avec toutefois une clause décisive : le mécanisme doit s'inscrire dans une durée préétablie afin d'agir comme incitation à déployer des politiques qui réduisent les discriminations, favorisent l'autonomisation et l'épanouissement. Le BLS aurait dû être partie intégrante du Mauritius-building. Mais, comme pour le quota ou le moratoire, sans être une fin en soi.

Les amalgames douteux, ou involontaires peu importe, suscitent toujours une polarisation improductive. Et, désabusé(e)s, les Mauricien(ne)s suivent la tendance mondiale. Depuis pas mal de temps déjà la plupart d'entre nous votent par défaut. Faute d’alternative crédible. Selon le président de la Chinese Chamber of Commerce la population sino-mauricienne à Maurice est descendue à 12000 et la tendance se poursuit. Si une communauté qui a la réputation d'être proactive ne se sent pas vraiment insider du système et choisit fatalement d’émigrer, c'est qu'il y a bien malaise mauricien.

Le tribalisme dépasse le cadre de l'ethnie et de la religion. Ensemble, l’oligarchie politique, son parrain l’oligarchie économique et leurs spin doctors constituent un redoutable émetteur de poudre aux yeux qui agit comme véritable frein au changement. Rarement son moteur. Nous ne pouvons plus prétendre ne pas entendre la colère des Mauricien(ne)s. Mais les écoutons-nous?  "Réforme", qu’elle soit électorale, économique, éducative ou autre rime désormais avec "galimatias" et "arnaque".

Best Loser System: Faking change in shameless fashion


One might have thought, or even wished, that the political oligarchy would have learned from its stinging failure in its attempt to mislead us with the "2e république" project. Not at all. Here is a fringe of this same oligarchy dumping the "Best Loser Seat" at us. As if there was no limit to abusing our despair.

There are certainly valid reasons to revisit our electoral system. In particular the financing of campaigns, the redrawing of the constituencies, a more equitable representation of candidates as well as citizens in all their diversity. No doubt, this is a complex task requiring diligence, patience and even, in some cases, referendum. Not this despicable and simplistic messianism that morphs into a session worthy of World Wrestling Entertainment where protagonists (including also wannabes), referees, chatterati, cheerleaders fake deliverance dramatically. Except that, in this case, spectators remain more or less numb.

The perversion of the United Nations Human Rights Committee (UNHRC) recommendation about the declaration of one's "community" to take part in elections crystallises the frenzy. Indeed, this body advocates that should we wish to carry on with the Best Loser System (BLS), without ever taking a stand on its abolition or not (in no way its responsibility for that matter), it is with an updated census. Otherwise we would be making a mockery of ourselves. As long as we argue consistently the case for or against the BLS. An elusive prospect for now.

What the political oligarchy is trying to sell us under different permutations, minted around an increase in the number of (predominantly) fat and one-track minded Members of Parliament, discredits it more than ever. By contrast, on June 10, 2015, the United Nations Economic and Social Council adopted a resolution  which states that the “census of population and housing is one of the main sources of data needed for implementation and monitoring of the effectiveness of policies and programs to promote socio-economic development for all and environmental sustainability.” No wonder we are being led astray with an erroneous census of population and housing.

Without even realising its sham, the political oligarchy even dares blame-gaming citizens for stirring up "communalism". According to its distorted view of "democracy", revisiting the 1972 data with its 4 anachronistic "communities" would open "Pandora's box". But it still reserves the right of access to its own "box" of 11 "communities", apparently "scientifically" derived from family names of the electoral register, which it instrumentalises cynically. Regardless how our way of life is invariably a reflection of our DNA.

We all have hyphenated identities. One can simultaneously be, say, Mauritian-Gay-Catholic, Mauritian-Male-Hindu, Mauritian-Female-Agnostic or any other combinations without altering one's patriotism. Defining communities by juxtaposing (non-) religious belief and ethnicity is difficult to avoid. It is our experience that determines the extent of overlapping of references within our plural identities. "Communalism" is not the disease per se. It is a symptom of a reality doomed by glass ceilings that triggers withdrawal into a “community” perceived rightly or wrongly as a refuge. Ethnicity-blindness is a gratifying utopia that turns into a joke when its proponents essentialise the emergence of a non-Hindu prime minister. An ethnicity-neutral approach that internalises the plural nature of the population would at least have the worthiness of not celebrating yet-another delusional "république une et indivisible".

We should refrain from misfiring as we have all become de facto "minorities" surviving a social mobility hijacked by networks of patronage. It would be wiser to ponder the relevance of "you cannot manage what you can't measure" should we desire to break out of the vicious circle. Although the BLS cannot exist without "community" counting, the latter is also critical for, namely, socio-economic, anthropological and medical research. "Kisa bebet" which does not distinguish between Kreol (Afro-Mauritian), Indien (Hindu), Blan, Milat (Euro-Creole), Mizilman, Sinwa and Madras (Tamil))? It is also critical that each citizen recognizes herself in each "box".

There will always be outliers who will not relate to any "box" either because, according to their self-image, Karl Marx, Che Guevera and Rosa Parks would embody them more faithfully or because the feeling "in-between" prevails. The categories "other", Pomien (identifying gleefully or unwittingly with Pays d'outre-mer - an extension of DOM-TOM), Don Quixote or Coconut are out of place. Maybe "métis" could "fit"? On the other hand, castes and sub-castes are to be avoided. What is certain, nothing must go ahead with consensus built within the political oligarchy exclusively. But in consultation with all stakeholders to come up with a thoughtful and flexible list for the vast majority of citizens. 

Pro-BLS voices are not necessarily sectarian. Otherwise Martin Luther King for example would have been a "communalist". They merely translate the failure of the BLS to live up to its mission even after 50 years. For various reasons, not everyone has the same anthropological profile. An affirmative action serves precisely to compensate for this discrepancy. However, a key clause went missing: the mechanism must be time barred in order to instill an incentive to harness policies that reduce discrimination and promote a sense of purpose. There is nothing reactionary about the BLS integrating the process of Mauritius-building. But, in similar vein as for the quota or the moratorium, it must not be an end in itself.

Sordid shortcuts always arouse painful polarisation. Disenchanted Mauritians follow the global trend. Lately most of us have been voting by default for lack of credible alternative. According to the president of the Chinese Chamber of Commerce, the Sino-Mauritian population in Mauritius has almost halved to 12,000 and there is no indication that the shrinking is abating. If a "community" that has the reputation of being proactive does not really feel insider of the system and chooses to emigrate, is it not because there is a "malaise" that is worryingly "mauricien"?

Tribalism is rampant beyond ethnicity and religion. Together, the political oligarchy, its godfather the economic oligarchy and their spin doctors constitute a sinister carrier of smokescreen which acts like a daunting obstacle to change. Rarely its engine. We can no longer pretend not to hear the anger of Mauritians. But are we listening? "Reform", be it electoral, economic, educational or anything else is henceforth akin to "galimatias" and sham.